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Loczy ou le maternage insolite

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Loczy ou le maternage insolite

Introduction
Pour répondre à la question "est-il possible d'élever de jeunes enfants en institution", les auteurs se sont rendus à BUDAPEST, à l'Institut National de Méthodologie des Maisons d'enfants de 0 à 3 ans, rue LOCZY. Cet établissement est dirigé par le Dr Emmi PIKLER, qui est partie du principe que "si un jeune enfant ne peut être élevé par sa mère, la relation maternelle ne peut pas être reproduite, mais il est possible de lui offrir dans le cadre d'une collectivité une expérience de nature tout à fait différente qui favorise son plein développement". Alors, tout est minutieusement pensé, vérifié, ajusté pour le bien-être et le bon développement de l'enfant.

Présentation de LOCZY
a- les enfants
En Juin 1971, ils sont 51. Leurs parents sont soit malades, décédés, soit ils ont des difficultés, soit ce sont des enfants abandonnés. Au premier abord, les auteurs sont frappés par leur aspect, tant ils sont "florissants, bronzés, souriants et animés". Ils sont la plupart du temps engagés dans une "bonne relation" avec un adulte, dont ils se montrent peu dépendants.

b- les adultes
Environ 70 personnes : des nurses qui s'occupent des enfants, des nourrices qui allaitent, des infirmières, une jardinière d'enfant, des psychologues, des médecins et tous ceux qui assurent l'administration, la cuisine, l'entretien... .

Principes directeurs
Ils sont au nombre de quatre et guident l'action de chacun :

-Valeur de l'activité autonome : développer le goût de l'activité autonome est essentielle pour que les enfants deviennent des adultes "créatifs et responsables", et ce par l'expérimentation des situations. Il est nécessaire que l'activité naisse de l'enfant lui-même pour qu'il l'investisse, avec une "auto-induction" qui renforce le résultat positif. Les enfants sont donc totalement libres de leurs mouvements -tout en étant protégés des dangers. L'adulte ne fait que placer l'enfant dans des situations qui correspondent à son âge, met du matériel à sa portée, respecte le rythme de ses acquisitions motrices et l'aide à prendre conscience de ses accomplissements.

- Valeur d'une relation affective privilégiée et importance de la forme particulière qu'il convient de lui donner dans un cadre institutionnel : La nécessité d'une relation affective privilégiée et continue avec un adulte permanent nécessite une grande constance dans les attitudes éducatives et un engagement du personnel dans une "relation réelle mais consciemment contrôlée, dans laquelle l'adulte ne fait pas peser sur l'enfant sa propre affectivité et ses attentes personnelles". Les soins sont donc individualisés au possible, et l'enfant n'est jamais seul : il y a toujours un adulte à portée de vue ou de voix. Ainsi, les enfants ne développent pas de demande affective trop importante, et ne sont pas frustrés, inquiets ou agressifs : "L'activité joyeuse et réussie dans laquelle l'enfant s'investit lui permet de renoncer en partie à ses exigences de contact, tandis que l'attention donnée pendant les soins est la garantie d'un niveau d'échange indispensable, mais suffisant pour que l'enfant ne sombre pas dans l'inaffectivité ni dans le syndrome d'insatisfaction affective".
L'équipe tout entière n'a de cesse "d'évaluer, de connaître et de contrôler le degré et la forme d'attention offerts aux enfants. La réponse de l'adulte ne doit pas dépasser la demande de l'enfant, elle doit rester plutôt un peu en deça et le renvoyer toujours à sa propre maîtrise de la situation qui, elle, est organisée à la mesure de ses possibilités."

-Nécessité de favoriser chez l'enfant la prise de conscience de lui-même et de son environnement : par la "régularité des événements dans le temps et la stabilité des situations dans l'espace", mais surtout lors des soins et du maternage, on aide l'enfant à découvrir qui il est, ce qu'il fait, quel est son environnement... . On stimule beaucoup sa participation pour lui permettre de s'exprimer et de devenir un adulte "autonome et responsable".

-Importance d'un bon état de santé qui sous-tend, mais aussi résulte de la bonne application des principes précédents : chaque enfant bénéficie d'un régime individualisé concernant son alimentation, son cadre de vie et le déroulement de sa journée. On privilégie au maximum la vie au grand air. L'organisation de cette institution n'a donc rien à voir avec un établissement hospitalier, mais s'apparente plutôt à une "maison à caractère familial".

L'organisation des groupes et les unités de vie
Il y a 6 groupes d'enfants, répartis selon leur âge. Chaque groupe peut contenir au maximum 9 enfants et est confié à trois nurses, seules à tour de rôle dans la journée, mais secondées par des "aides-nurses". Chaque nurse s'occupe de tous les enfants, mais est plus spécialement responsable de 3 d'entre eux. Les nurses changent de groupe avec les enfants, et les "suivent" ainsi jusqu'à leur départ.
Au fur et à mesure que les enfants grandissent, ils changent de lieu de vie, avec leurs nurses. Le déménagement est préparé minutieusement pour ne pas dépayser les enfants. Les enfants sont là quand on change leur lit de lieu, les plus grands peuvent même aider à le pousser. Les enfants sont amenés un à un dans la nouvelle pièce.
Chaque groupe a une "unité de vie" à l'intérieur et une à l'extérieur. Ce qui veut dire que dehors, les enfants ont aussi un lit, un espace de jeu, de change et de repas organisés comme à l'intérieur. La distance entre les deux lieux de vie augmente en fonction de leur capacité de marche. D'avril à octobre, tous les enfants passent leurs journées entières dehors. Ensuite, ils continuent tous (à partir de 4 semaines) à faire la sieste dehors, même par -10 degrés. Les plus grands vont en promenade (au moins 2 heures) par tous les temps. Les enfants sont également mis nus dehors autant que possible.

Les soins
Le plaisir que prend l'enfant dans les soins est primordial, cela favorise son désir d'autonomie. Les soins permettent également la construction de la relation affective avec les nurses et la prise de conscience de soi-même. L'enfant est toujours considéré comme comprenant, la nurse n'est jamais pressée et donne à l'enfant tout le temps dont il a besoin, sans jamais interrompre un soin. Tous ses gestes sont doux, et elle a le souci constant de "faire appel à la participation" de l'enfant : elle lui parle en expliquant ses gestes et ses réactions, quel que soit son âge, elle lui présente l'objet qui va être utilisé, et elle utilise les gestes spontanés de l'enfant, toujours dans le but de développer sa "coopération active".
Les soins sont donnés dans un ordre rigoureux. Chaque enfant a son tour pour les soins. Cela permet de supprimer en partie les temps d'attente si pénible, puisque chaque enfant s'habitue à l'ordre des soins. Mais il a son propre rythme veille-sommeil.

a- Les bains et les changes
Les auteurs nous en donnent une description détaillée et plusieurs exemples qui nous montrent que tout est fait pour le bien-être de l'enfant. Les soins sont de bonne qualité, mais pas plus longs pour autant. Cependant, cette qualité, le calme de la nurse et l'absence d'empressement qui caractérise ses actes donnent une impression de temps plus long. Un bain qui dure 8 minutes en parait 15.

b- Les repas
Le biberon est jugé un intermédiaire inutile : les bébés sont nourris au sein jusqu'à 6 mois environ, (par la suite, les nourrices disparaîtront et les enfants seront alors nourris au biberon) et la cuillère est introduite progressivement. Ici encore, l'absence de hâte, l'attention de la nurse et le confort des enfants donnent une impression de contact réel de part et d'autre et efface la brièveté.

c- Les examens médicaux
C'est toujours le même médecin que voit chaque enfant. La visite médicale est un moment heureux pour les enfant, qui est pour eux l'occasion de prendre conscience de leur corps.

d- Les jeux libres et les activités autonomes
"L'activité spontanée auto-induite que l'enfant poursuit librement de façon autonome a une valeur essentielle pour son développement; elle doit être pour lui une source de plaisir sans cesse renouvelée." Les enfants sont placés dans des situations favorisant cette activité autant que possible. Pour cela, on tient compte de:
. la répartition dans le temps selon le rythme veille-sommeil : l'enfant doit être bien éveillé pour profiter pleinement des expériences; dès qu'il donne des signes de fatigue et le couche pour se reposer,
. l'espace : il doit être juste un peu plus vaste que celui que l'enfant peut remplir par son activité, afin de lui permettre d'évoluer tout en le maintenant dans un environnement sécuritaire qu'il peut appréhender dans sa totalité de façon autonome, il doit permettre aux enfants de ne pas se gêner tout en pouvant se rencontrer, et ne doit pas être dangereux,
. le matériel de jeu : il "tient compte des possibilités locomotrices et manuelles des enfants et correspond à l'évolution de leur intérêt",
. les interventions de l'adulte : il ne doit pas interférer de façon directe dans le jeu (sauf si l'enfant est en situation difficile : disputes, ennui...), mais maintenir les conditions optima à l'activité auto-induite, commenter les progrès et favoriser la prise de conscience.

e- Autres activités et relations sociales
Ce sont des promenades, un temps avec la jardinière d'enfant, aller à un anniversaire, accompagner un adulte dans son travail : le médecin, le jardinier... . Ces activités servent trois buts : offrir à l'enfant un éventail de relations sociales, élargir son champ d'expériences, et rompre la monotonie quotidienne et sortir pour un temps de la vie en groupe.

f- La structure institutionnelle
Pour offrir aux enfants ce mode de soins et ce type de relation, une organisation rigoureuse est nécessaire, afin que chacun, à tous les niveaux, sente sa responsabilité engagée. C'est pourquoi il existe des moyens "pour permettre à chacun de comprendre le sens des interventions qui lui sont demandées, de partager avec d'autres sa connaissance de chaque enfant, de trouver aide et soutien face aux problèmes rencontrés et de progresser dans sa compétence professionnelle."

Le personnel est donc constamment encadré et formé, par un important travail d'équipe, dans un réseau de communication à caractère horizontal et pyramidal.
L'enfant est en permanence observé par sa nurse, dans la relation, afin de "répondre à toutes ses manifestations de vie sur un mode qui l'ouvre sur l'extérieur, le sécurise et favorise son développement. Cette observation est également enregistrée à des fins scientifiques.
Le docteur VINCZE a en charge le travail avec les parents pour leur "permettre de sentir qu'ils restent bien les parents de leur enfant et de combler la distance créée par la séparation". Pour cela, on leur fait un compte rendu détaillé de ce que fait l'enfant, de ses progrès, de son caractère... afin de maintenir éveillé leur intérêt pour l'enfant. Le retour dans la famille est minutieusement préparé : les parents viendront voir l'enfant plusieurs fois, de plus en plus longtemps, au début avec la nurse puis seuls, avant de la ramener à la maison. On essaie de leur faire comprendre que "l'intensité de leur lien futur ne dépend pas de la vitesse avec laquelle l'enfant les accepte." De leur côté, les nurses parlent beaucoup aux enfants de leur famille, les préparant à ce qu'ils vont y retrouver, mais aussi aux difficultés de la séparation avec Loczy. Enfin, les enfants emportent avec eux un objet de l'institution. Pour ce qui est des abandons, les familles sont aidées dans ce choix, afin d'éviter les abandons "différés".

g- Discussions des résultats
Les auteurs vont maintenant tenter de répondre à la question : "Est-il possible d'élever en institution des enfants du premier âge tout en maintenant intègre leur capital de santé mentale jusqu'au moment où ils pourront bénéficier d'une vie familiale stable?"
Le premier constat est que ces enfants apparaissent comme "privés de quelque chose d'essentiel dont bénéficient les enfants comblés" qui vivent dans des familles équilibrées, mais échappent "au sort effroyable" des enfants sans famille et carencés des pouponnières, et reçoivent d'indiscutables atouts. Les auteurs admirent l'entreprise qu'est Loczy.

Analyse des facteurs de réussite de Loczy
Cette institution est remarquable sous trois aspects principaux :

. L'acceptation des exigences d'une telle entreprise, qui nécessite des efforts conscients, une organisation minutieuse, du contrôle de soi, de la discipline, mais surtout un intense intérêt pour l'épanouissement de l'enfant. Les auteurs comparent alors avec la situation des institutions en France, où la directrice est souvent le seul cadre à temps plein qui est chargée de tout : administration encadrement, matériel... Parfois aussi des remplacements. A l'époque, les auxiliaires n'ont qu'une année de formation, sont jeunes et sont "difficiles à encadrer et à former parce qu'elles estiment qu'étant femmes elles savent s'occuper d'enfants". Le médecin et le psychologue sont vacataires, donc peu présents, et font essentiellement de la surveillance. Alors, "lorsque nous voyons tout ce que nécessite la marche d'une institution qui veut vraiment développer pleinement ses enfants, nous sommes loin du compte".
. Suppression des principaux facteurs de carence et de stress : absence de changements de lieux, de nurses, de compagnons de jeu, soins personnalisés et personnalisants qui développent chez l'enfant un sentiment d'intégrité et d'identité, création d'une relation privilégiée et significative, stimulation du développement psychomoteur et intellectuel de façon indirecte mais soutenu verbalement, lutte contre l'aliénation du milieu et la pauvreté des relations sociales.
. Instauration d'un maternage compatible avec la vie en institution : A Loczy, le maternage mis en place tend à éviter la dépendance. Les nurses font preuve de contrôle de soi et semblent parfois peu "maternelles". "Ce système de soins est-il un substitut à une relation de type maternel ou est-il au service et l'instrument d'une relation réelle bien que profondément différente et qui, pour être bénéfique, doit prendre cette forme particulière dans le cadre d'une collectivité ?" Car prendre de la distance apparaît comme primordiale, tout en maintenant les échanges affectifs. L'expérience de Loczy nous montre que cela est difficile est nécessite des connaissances spécifiques et de la maturité. Ce n'est pas dans ce type de relation que les nurses doivent rechercher à être rassurer sur leur qualité maternelle. Les auteurs nous parlent ici de l'expérience de la pouponnière d'Amyot, en France, qui a montré qu'il était "difficile, dans le cadre d'une institution, d'entrer affectivement en contact avec un nourrisson qui n'est pas le sien". Mais cela est possible. Seulement, si cette relation ne s'établit pas sur un mode bien précis -tel celui observé à Loczy-, "l'éveil des sentiments maternels" chez la nurse l'absorbe tant qu'elle ne peut plus remplir ses tâches correctement ni s'occuper de la même façon des autres enfants. De plus, la séparation la laisse "désemparée et indisponible au suivant".
"Ainsi, le point de vue, encore largement répandu en France, selon lequel toute femme est capable de s'occuper de jeunes enfants pourvu qu'elle soit chaleureuse, aime les enfants, ait du bon sens et pas de problèmes personnels, doit être dénoncé. De même que c'est un leurre de penser qu'une femme peut soigner des enfants en institution au travers d'une relation qui fait appel à ses sentiments maternels." Car ce type de relation ne fait qu'accroître la demande de l'enfant, à laquelle l'adulte ne peut répondre. L'enfant vit alors le rejet, la nurse l'anxiété et la culpabilité et le malaise, et tous deux peuvent avoir des sentiments agressifs. C'est pour cette raison que le personnel développe des "attitudes défensives qui le protègent de tout engagement affectif à l'égard des enfants. Ces attitudes induisant à leur tour une organisation institutionnelle et des modes de soins vecteurs de carences pour les enfants." De plus, on attend des jeunes auxiliaires qu'elles trouvent "spontanément cette aptitude à aimer ces enfants tout en restant à la bonne distance". Si leur formation n'est pas suffisante, elles sont inévitablement mises en situation d'échec, et c'est alors leur position maternelle qui est mise en question et qui leur est reprochée.

La question qui surgit alors est : 'peut-on construire au travers des soins une relation autre que celle dictée par les sentiments maternels?'
Chaque relation mère-enfant est différente et s'exprime au travers d'un pattern d'interactions qui façonnent le développement de l'enfant. Dans la relation nurse-enfant, un pattern existe, consistant, fort, prégnant, il est également un "facteur essentiel de structuration de sa personnalité" (de l'enfant). Cependant, à Loczy, ce pattern est le même pour tous les "couples" nurses-enfant. Cela permet à l'enfant de percevoir la continuité entre les trois nurses qui l'ont en charge, et facilite le transfert de la relation sur une nouvelle nurse lors d'un changement.
Dans la relation mère-enfant, ce sont les motivations profondes de la mère face à ce qu'est et ce que représente le bébé qui "donnent au pattern son orientation et son caractère spécifique. C'est l'intensité de ces mouvements affectifs profonds qui lui donne sa force, lui imprime son sens et sa qualité".
Dans la relation nurse-enfant, les motivations personnelles de la nurse ne devraient pas entrer en jeu pour déterminer le pattern d'interactions. C'est une méthode de travail qui répond à une règle institutionnelle, et qui limite dès lors les "impulsions maternelles" des nurses et les en protège. C'est son application rigoureuse qui permet au pattern de devenir un facteur d'organisation de la personnalité de l'enfant. C'est pour cela que ce pattern ne peut "être intériorisé que progressivement et demeure fragile". Les auteurs le comparent à un organe artificiel, qui nécessite "un appareillage compliqué", un réglage minutieux, qui nécessite surveillance et contrôle. Et tout ce système de "maternage insolite" est mis en action par la tendresse des directeurs de Loczy et leur volonté de donner le meilleur possible aux enfants.

Enfin, dans la relation mère-enfant, ce sont les élans affectifs mutuels qui organisent le pattern, alors qu'ici c'est sa mise en pratique qui permet à une relation de naître, lentement. Cette relation a au moins le mérite d'exister, et assure bien, selon les auteurs, la fonction de "holding" dont parle Winnicott.

Les auteurs reviennent dans le détail sur ce pattern d'interactions entre la nurse et l'enfant. Tout comme la relation mère-enfant, il est défini par :
- la quantité d'interactions : elle est continue pendant les soins mais brève pendant l'intersoin afin que l'attention de l'enfant soit tournée vers le jeu et l'activité autonome.
- la forme des interactions, qui est au service du maintien d'un certaine distance dans la relation : indirecte et vigilante pendant l'intersoin, elle se caractérise lors des soins par une "succession rapide de chaînes très courtes".
- les modes d'interaction : la parole, le regard, qui favorisent l'autonomie et la prise de conscience de l'enfant, mais aussi les modes kinesthésiques qui assurent le sentiment de sécurité et de confort. La qualité des gestes de la nurse sont importants, tout en limitant les gestes de tendresse ou les contacts corporels érotisants.
- la tonalité de l'interaction, "qui véhicule l'intensité et la nature des élans affectifs" : la douceur et les réponses contenues transmettent une "impression d'attention et de vigilance affectueuse" dans laquelle l'enfant se sent apprécié. La nurse ne laisse passer aucune intensité d'émotion, quelle qu'elle soit. "Le Dr Pikler attache autant d'importance au contrôle de l'agressivité qu'à celui des élans chaleureux".


Impact de l'interaction sur la personnalité de l'enfant
. Les secteurs privilégiés : l'immense valeur accordée à chaque manifestation du développement psychomoteur, toujours reprise dans l'interaction, stimule le plaisir de l'enfant à s'exercer et à se développer. L'appareil psychomoteur fonctionne donc à plein. De plus, la limitation ferme de "l'investissement de la libido sur la nurse favorise son déplacement sur les activités et les jeux". Mais les auteurs notent plusieurs domaines inexploités : ceux des jeux symboliques, de l'imaginaire et des créations artistiques.
. L'acquisition des disciplines : les routines souples et réajustées en permanence évite qu'elles soient sources de conflit. Dés lors, les enfants apparaissent naturellement disciplinés.
. Tolérances, limites, interdits et frustration : Les demandes d'affection supplémentaires ne sont pas ignorées par les nurses, mais "elles ne répondent pas en fonction de leurs propres émois, désirs ou agacements, mais selon les modes institutionnels autorisés et recommandés." L'enfant vit alors la frustration, et doit nécessairement en faire l'apprentissage. De plus, comme l'acte agressif est interdit, "les pulsions libidinales et agressives (qui résultent de la limitation de la réponse affective) sont en grande partie investies dans l'activité, le plaisir d'être, de se mouvoir, de connaître, tandis qu'une partie beaucoup plus faible et très contrôlée est investie dans la relation à la nurse et aux autres enfants. Ce contrôle et cette canalisation des pulsions étant favorisés par le développement d'un moi fortement équipé sur le plan psychomoteur et l'ébauche d'un surmoi ferme, mais non punitif et n'interdisant pas le plaisir."

Bilan de ce système de soins
Ces enfants, comparés à ceux qui vivent heureux dans leur famille, "acquièrent quelque chose de sérieux, attentif, réfléchi, avec un je ne sais quoi de retenu, de fragile." Ils présentent en fait des signes de maturité précoce et de fragilité affective.
. Atouts donnés aux enfants : un corps sain et vigoureux, la constitution d'un soi, un solide investissement narcissique de base, un accès au langage et donc à la pensée symbolique, une "faculté d'intérioriser les discipline sur un mode positif qui devrait favoriser le développement d'un surmoi fort, mais souple et non punitif". De plus, les différenes étapes du développement sont franchies en temps voulu, au rythme de l'enfant. "Ils se sentent exister, ils ont le sentiment de leur valeur, le désir et la possibilité d'agir, ce qui est beaucoup."
. Limites inhérentes au système institutionnel : le départ des enfants, lorsqu'il se fait après 15 mois, ne peut éviter la rupture de l'attachement fondamental, et le deuil à vivre est difficile. En outre, l'aliénation du milieu existe, puisque les enfants ne connaissent en fait que des adultes qui ne font que s'occuper d'eux. Ils ne les connaissent pas dans les autres situations de la vie, notamment dans la situation de couple. L'identification à l'adulte est donc limitée.

Les risques du maternage de Loczy
. En famille, les enfants grandissent par les conflits. Or, la "dialectique conflictuelle" dans la relation à l'adulte existe peu à Loczy. Les nurses réagissent en fonction des enfants, pas en fonction de leurs motivations profondes à elles. Les enfants ne sont pas préparés aux conflit avec les adultes.
. Concernant leur capacité à s'engager dans des relations affectives profondes, les auteurs s'interrogent : "n'est-il pas sans danger d'être privé, tout petit, de la plénitude d'une relation qui réponde aux besoins primitifs de dépendance? Ne sont-ils pas privés d'une part de leur richesse affective?"

Les auteurs concluent en disant que quelles que soient les critiques que l'on peut formuler, il ne faut pas oublier que Loczy donne certainement plus aux enfants d'atouts qu'elle ne leur retire de possibilités.

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