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Conseils de psy

L'angoisse, le kérozène invisible de la folie humaine.

/ Par Dimitri Haikin / Mal-être

L'angoisse, le kérozène invisible de la folie humaine.

En effet, d’après le procureur de Marseille :  « Seul dans le cockpit, le copilote manipule le bouton du flight monitoring system pour actionner la descente de l'appareil", poursuit le procureur. "Cette action ne peut que être volontaire. »

 

Cette hypothèse effroyable glace le sang et nous plonge dans l’incompréhension la plus totale. Comment un homme ,avec des capacités intellectuelles élevées lui permettant d’obtenir son diplôme de pilote, peut-il, comme cela, un jour, sans que personne dans son entourage professionnel n’ait perçu le moindre signe inquiétant, poser un acte aussi abject qui démontre à quel point la folie des Hommes peut être sans limites…

 

Que penser également de la confiance aveugle que le commandant de bord devait avoir envers « son  second » pour lui confier le pilotage et le Cockpit de l’appareil sans se douter une seconde que…

 

Alors comment expliquer l’inexplicable ?

Dans la presse d’aujourd’hui, nous découvrons qu’Andreas Lubitz a connu une hospitalisation psychiatrique suite à un « épisode dépressif lourd », en 2009. 

 

Qu’est ce qu’un « épisode dépressif majeur » ?

C’est une période de la vie où la personne est plongée dans un profond état de tristesse, perd l’intérêt par rapport à ce qui l’animait jusque là, connaît une nette baisse de l’énergie mais aussi de l’estime et la confiance en soi.  Cet état est souvent associé également à des troubles du sommeil et de l’appétit. Elle peut aussi être sous l’emprise d’une culpabilité injustifiée et avoir des idées noires, voire suicidaires.

 

Dans l’état de dépression majeure, la personne est habitée par un profond sentiment d’impuissance et un niveau élevé d’angoisse.

 

L’angoisse est une sensation physique intense qui donne le sentiment de perdre le contrôle de soi et de sa vie. Elle résulte d’une multitudes d’émotions réprimées depuis longtemps : des peurs, des tristesses, des colères qui au fil du temps se sont comme « nouées » et donnent au corps la sensation d’une boule oppressante qui se loge au niveau du ventre, du coeur ou de la poitrine.
 

L’omniprésence de l’angoisse peut mener le sujet dont la personnalité à la base est fragile, sur le chemin de la folie et des actes les plus destructeurs. L’angoisse est le kérozène invisible de la souffrance humaine.

Bien heureusement, la très grande majorité des personnes qui traversent un épisode dépressif dans leur vie, s'en sort et  le surmonte sans ressentir de pulsions auto-destructrices iou destructrices envers autrui.

Dans le cas d'Andreas Lubitz, c'est sa supposée structure de personnalité psychotique associée à une dépression sévère qui est probablement à l'origine de son acte de folie.
 

Qu’est ce qu’une personnalité fragile « à la base » ?

C’est une personnalité qui s’est construite soit sur une structure psychotique soit sur une structure perverse.

 

La personnalité psychotique perd le contact avec la réalité du monde qui l’entoure. Elle se déconnecte de la réalité, se dissocie de ss émotions et s'enferme dans un mal-être extrêmement profond. Elle construit régulièrement des délires de différents types : mégalomanie, missions à accomplir,... Ceux-ci sont parfois dictés par des voix.
 

La mélancolie est une forme de psychose endogène présente depuis l’enfance. Elle se traduit par des épisodes profonds de dépression et se traduit par des pensées morbides.

Il est habité par un profond sentiment de culpabilité qu’il a tendance à retourner contre lui-même. Le risque suicidaire est très élevé chez ce type de personne et peut mener à des coups de folie comme celui qu’Andreas Lubitz a commis.
 

Ceux-ci peuvent être déclenchés par un nouvel événement qui « replonge » la personne dans ses zones de personnalité les plus obscures comme une rupture amoureuse, la perte d’un être cher ou un conflit violent. C’est mon hypothèse dans le cas qui nous occupe. Cependant, il est important de savoir que la plupart des personnalités psychotiques ne commetent pas de passages à l'acte et que l'on est ici dans quelque chose d'heuresement rarissime.

 

A contrario, la personnalité perverse se construit en dehors de toute forme de sentiment de culpabilité mais autour d’un égo sur-dimensionné, intolérant à la moindre frustration.  Ils développent un rapport à l’autre basé sur le sentiment de « toute-puissance ». On y retrouve notamment les psychopathes capables de passages à l’acte les plus abjects. Néanmoins, la pulsion suicidaire y est plus rare car le pervers tient trop à la préservation de sa propre personne.

 

Décidément, il nous accepter que l'on ne pourra  jamais prévoir jusqu’où les zones d’ombres invisibles de l’Homme peuvent le pousser aux actes les plus abominables.

Toute cette affaire pose également toute la compléxité du secret médical dans nos métiers. Jusqu'où doit-on s'y tenir ?  A partir de quand faut-il penser à protéger la vie d'autrui ? Il est grand de rouvrir le débat.

Aujourd’hui, l’actualité nous démontre malheureusement que la folie des Hommes est bien sans limite et que ses capacités destructrices ont sans doute atteint ici leur apogée… Néanmoins, nous n'avons d'autre choix que de continuer à faire confiance aux autres et à la vie car la souffrance est bien souvent invisible et indétectable.

 

Dimitri Haikin

Psychologue-Psychothérapeute

d.haikin@psy.be