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François Pirette, un homme pas comme les autres !

François Pirette, un homme pas comme les autres !


Bonjourrr Madame, c’est François Pirrrette au téléphone ! (NDLR : les « rrr » pour l’accent du borinage).
Entre rires, souvenirs et confidences, ce recordman d’audiences télé vous emmène dans les coulisses de sa vie. Flash-back :

François Pirette est né à Mons, en Belgique, le 7 février 1963. Thierry Van Cauberg traverse son adolescence «à l'ombre des terrils». Comme Adamo, il a vécu à Jemappes. Le petit Thierry habite la même rue que son illustre voisin pendant plusieurs années. Il grandit bercé au son des sonnettes de tram, des grèves de métalos, des tambours de Gilles, des tests de sirène d'alarme (son papa travaille à la banque) et des fous rires des dimanches après-midi. Car au Borinage, si on s'engueule beaucoup, on rit aussi énormément.
Inscrit à 19 ans dans une école de publicité (pour échapper au moins un an au service militaire), il y rencontre Jean-Loup Viseur, professeur de l'élève antimilitariste. Jean-Loup, aussi producteur d'émissions de radio, confie alors à Thierry un job de standardiste, le week-end, au centre de production de la RTBF à Mons. Ravi de ne pas devoir cuire des hamburgers au Quick ou pousser des caddies à Carrefour pour gagner son argent de poche, c'est avec enthousiasme que Thierry décroche le téléphone d'octobre à décembre 1982.
 Le 9 janvier 1983, il est propulsé sur l'antenne nationale de la radio et y décroche d'emblée sa propre émission, tous les dimanches de 10 à 11 heures. Thierry, sans vraiment s'en rendre compte, faisait beaucoup rire Jean-Loup et sa bande. Il n'a encore que 19 ans et ne sait pas encore que le conte de fée a déjà commencé...
Dix ans de radio dominicale plus tard, Thierry, devenu François Pirette par la force des ondes et du canular téléphonique, s'est illustré sur scène, à la radio, à la télévision et est devenu, au gré des hasards, des succès et des records, sans doute l'un des amuseurs les plus populaires de Belgique. En 1994, Laurent Ruquier lui propose de rejoindre l'équipe de son émission quotidienne «Rien à Cirer» sur France Inter puis sur France 2. Ils collaboreront joyeusement deux saisons de suite.
Mais en 1996, Thierry, alors éloigné de sa Belgique depuis près de deux ans, trempe goulûment la plume dans sa belgitude et écrit depuis Paris «J'ai très bien connu Chose!», one-man-show de trois heures qui le consacrera chez lui «artiste de tous les records».
 En mai 2003, quatre spectacles plus tard, Forest National affiche deux soirs de suite le nom du standardiste engagé 20 ans plus tôt à la radio. Plusieurs fois «vidéo d'or et de diamant», François Pirette s'illustre aussi au théâtre en adaptant, en jouant et en mettant en scène «Le Père Noël est une ordure» et tout récemment «La bonne planque» qui fera même l'objet d'une retransmission en direct, une grande première pour la télévision et le théâtre belges. Nouveau succès, puisque la pièce est consacrée meilleure audience de l'année 2003 pour la chaîne du service public.
Aujourd'hui papa de trois filles (et bientôt un heureux événement est prévu), il a choisi de vivre en France depuis plus de 12 ans et s'est enfin posé, à un jet de TGV de Paris ou de Bruxelles, loin des embarras du Ring Est et du Boulevard Sébastopol pour mieux penser à ce qui le fait rire et écrire.

Entretien exclusif pour www.psy.be

François Pirette, ce nom ne sonne-t-il pas un peu bizarre pour les parisiens ?
Non, pas pour eux ! Mais pour moi, oui. Cela fait bientôt 25 ans que ça me sonne bizarre à l’oreille. J’ai toujours eu beaucoup de mal - et je crois que ça sera définitif - à gérer, non pas cette double entité (parce qu’il n’y pas de schizophrénie là-dessous) mais ce nom tout à fait ringard. J’ai eu un peu de difficulté dans le décalage de l’image que je souhaitais donner de moi, peut-être avec une certaine prétention, je l’avoue ! Je trouve que Bedos et Palmade, ça sonne beaucoup plus et mieux que Pirette qui a un petit côté province. Pour l’oreille des parisiens, je m’appelle comme ça et point barre. Pour la petite histoire, Laurent Ruquier, qui m’a permis de m’exprimer pour la première fois en France, d’abord n’a jamais pu m’appeler Thierry parce qu’il était persuadé que je m’appelais François. Ensuite, je lui avais dit : «  J’ai beaucoup réfléchi, je pense que pour la France, qui est un territoire vierge pour moi, je préfèrerais m’appeler Vanco. Ici, je peux tout reconstruire. Pirette, j’ai du mal ! ». On descend en studio et sur le générique, il dit : « Je vous présente notre nouveau collaborateur : François Pirette ». C’était grillé, fini. J’ai toujours beaucoup de mal, même au téléphone, (je me lâche c’est une interview psy) lorsque je dois contacter des gens dont je sais pertinemment que le seul prétexte de notre relation, est un prétexte professionnel lié à mon pseudo, à me présenter en tant que François Pirette. Je dis : «  Bonjour, c’est Thierry Van Cauberg au téléphone ou François Pirette, si vous préférez. ». Je m’annonce toujours comme Thierry Van Cauberg, c’est rarissime quand je fais autrement. Cela dit, sur une affiche, c’est déjà trop de lettres en largeur, Pirette. Alors, Van Cauberg, vous imaginez ! Pour le moment, comme j’ai mon nom affiché au théâtre avec des lettres en néon que je suis obligé de louer, je suis, finalement, heureux de m’appeler Pirette et non Van Cauberg. Chaque lettre me coûte des centaines d’euros par mois. (Rires…)

Thierry Van Cauberg, vous êtes papa et vous venez de perdre le vôtre. Etes-vous de ceux qui  disent : « On ne pleure pas un être qui part, on est heureux de l’avoir connu ? »
Non, parce que c’est une façon de s’arranger de son deuil, en tout cas en ce qui me concerne. Je vais être plus concret que cela. Je vais dire quelque chose qui va paraître violent pour certains et j’en assumerai le risque. Vu l’état de santé de mon papa, je suis soulagé pour lui qu’il n’ait plus à souffrir de l’image qu’il nous donnait. Il avait beaucoup perdu de sa dignité. Il souffrait. Je suis soulagé pour lui. Je n’arrive pas à me consoler de la tristesse de l’avoir vu finir comme ça. Mais, je ne me console pas pour autant de son départ en me satisfaisant d’une formule toute faite. Je sais maintenant ce que c’est d’être orphelin de père et j’y penserai, à mon avis, tous les jours jusqu’à la fin.

Vous êtes un père comment ?
Joker. Je ne sais pas ce qu’on répond dans ces cas-là. J’ai 3 enfants, donc je suppose que je suis 3 pères différents. Les circonstances de la vie ont fait que j’ai un jour, avec la maman de mes premières filles, pris la décision que nous ne vivrions pas ensemble plus longtemps. Cela fait maintenant 13 ans que je suis séparé de la mère de mes filles et divorcé. Donc, je suis un père différent pour mes grandes filles que celui que je suis avec la petite que j’élève avec ma femme actuelle. C’est sûr que je dois être un père différent. Et je vais l’être à nouveau tout bientôt donc je serai encore différent.
 

Félicitations ! Merci, vous êtes bien aimable. Je suis sans doute un père sinon meilleur en tout cas plus performant avec Lilou qui n’a que 5 ans que je ne l’étais avec Romy qui en a déjà 18. Elle a essuyé les plâtres de ma jeune paternité de l’époque. Je serais bien malhonnête de ne pas le reconnaître.

On dit souvent que le rire c’est bon pour la santé, qu’il n’y a rien de tel qu’un bon fou rire. J’ai retrouvé une phrase de Beaumarchais : « Je me presse de rire de tout de peur d’être obligé d’en pleurer ». Ca vous inspire quoi ?
Ca me ressemble énormément. J’ai des souvenirs de moi, ado, visitant des parents à l’hôpital, des parents très malades. Je me suis rendu compte très tôt que lorsque j’étais dans le malaise, je devenais original. Ce n’est pas une exclusivité, je sais que beaucoup de gens sont comme ça. Lorsque je suis dans le malaise, il faut que je m’en échappe par le rire. J’ai beaucoup d’inspiration, mon cerveau se met en marche et il me vient une foule d’idées. Dès que je suis dans la tristesse, dans l’inconfort moral , j’ai besoin d’en rire. Maintenant, je n’arrive pas à rire de tout et loin de là.

La question suivante était justement : peut-on rire de tout ?
Le rire est quelque chose qui fait plaisir. On se fait plaisir à soi en riant. On ne fait de mal à personne. Maintenant, qu’on froisse des susceptibilités en riant en groupe large ou restreint, ça c’est autre chose. Roberto Begnini, en réalisant son film « La vie est belle », a donné une réponse définitive à la question. Il est même parvenu à décrocher un oscar et une palme à Cannes. C’est le premier à avoir mis en scène la Shoa dans une comédie. Il a fait rire aux larmes tout en faisant pleurer sur le sujet le plus dramatique de toute l’histoire de l’humanité. A partir de là …

Avez-vous des regrets dans votre vie ? Oh oui !
Lesquels ? Je pourrais en remplir deux cahiers de 120 feuillets. Dans ma vie professionnelle ou dans ma vie personnelle ?
Personnelle ! J’ai surtout le regret d’avoir perdu beaucoup de temps par rapport à certaines personnes, d’avoir été absent de leur vie pendant de trop longues années pour des malentendus, pour des questions d’humeur du moment. Mon plus grand regret, c’est le temps perdu. Le temps perdu avec des gens que j’aime. J’étais dans l’incapacité de les voir ou de les rencontrer. Ils sont quelques-uns, beaucoup de ma famille. Mais on se console en se disant que, peut-être, il fallait passer par ces moments d’absence pour garantir la sincérité de notre relation.

Est-ce que Thierry Van Cauberg a peur d’aimer ? Non !
Est-ce qu’il a appris à aimer ? J’apprends tous les jours. Il m’a fallu plus de 32 ans pour rencontrer la personne avec qui je vis aujourd’hui. Dès les tous premiers instants, j’ai compris que ce serait la dernière. En tout cas, c’est mon choix. Le sien sera peut-être autrement. Mais, si jamais ça ne devait pas être la dernière, ce ne serait pas de mon fait.


Autrement dit, c’est la femme de votre vie ? De ma mort, comme on dit.

On dit parfois que Thierry Van Cauberg a un caractère de cochon. C’est vrai ?
Oh non, ce n’est pas vrai. D’ailleurs, j’ai un cochon. Il est beau. Il est bien cet animal. C’est mon deuxième. J’en avais un et je l’ai perdu après 10 ans. Ca m’a tellement manqué que j’en ai repris un tout de suite. C’est un magnifique petit cochon minuscule, adorable.


Il s’appelle comment ?
Il s’appelle Nana. Le précédent, Saucisse. Je ne vais pas éluder la question. Je crois que je n’ai pas un sale caractère mais de la personnalité. Je vais dire quelque chose d’un peu maladroit mais tant pis : ce n’est pas obtenir ce que je veux, c’est obtenir ce que je pense être juste. Si c’est du rouge qu’il faut mettre, il ne faut pas choisir du bleu par paresse ou par facilité. Là, je deviens fou. Encore ce matin, j’ai pété un plomb. Je passe des nuits à peaufiner les détails de la sortie du nouveau DVD. Je produis tout moi-même. Quand je reçois le travail, qu’on y a touché et que finalement c’est moins bien parce qu’ils se sont gourés, là ça m’emmerde et je deviens un peu teigneux.

Qu’est-ce qui fait les déclics de tel ou tel personnage, de telle ou telle réplique ?
Il y a quand même des phrases clés. Je me souviens d’une de vos affirmations : « On devient ce qu’on mange, mange ton boudin ! » C’est idiot mais ça me fait rire!
Rassurez-vous c’est complètement con. Moi aussi, elle me fait rire et heureusement ! La première personne que je fais rire, c’est moi. Je suis donc d’une sincérité avouée. Par contre, il y a des sketches ou des situations, que j’ai pourtant écrits de bout en bout, qui, par la suite, m’ont saoulé. Je ne peux plus les écouter. Pour en revenir à la phrase : « On devient ce qu’on mange, mange ton boudin ! », je ne sais pas d’où elle vient. Parfois, quand je relis des trucs comme ça, je me dis mais comment ai-je trouvé ça ? C’est la fulgurance d’une inspiration à un moment.

Dans la galerie de vos personnages, il y a Amédée. Ce vieillard peut vous permettre beaucoup de choses. Je pense, par exemple, au jeu de Monopoly où la chute du sketch fait réfléchir.
 Aïe, il y a longtemps, je ne m’en souviens plus ! « Au Monopoly, c’est comme dans la vie. Plus on gagne, plus on a d’argent et plus on se retrouve tout seul ! » Je devrais ressortir ça ! Bonne idée.
C’est criant de vérité ce passage ? Amédée m’a valu beaucoup de bonheur. Il m’a sans doute permis de gagner des suffrages auprès de certaines personnes qui ne m’en auraient pas accordé si je n’avais pas créé ce personnage. Par contre, j’espère rester lucide sur la démarche. Je suis persuadé que ce personnage m’a permis de faire et de dire des choses parfois très crues voire maladroites. Mais, elles étaient enveloppées dans les rondeurs du personnage, donc ça passait. Ce qui m’étonne parfois, c’est qu’on vienne me dire : « Oh ! Vous êtes tout en sensibilité dans ce personnage, vous êtes très sensible. Oh ! c’est gentil, c’est formidable ». Alors que je raconte les pires saloperies, les trucs les plus égoïstes. Je ne voulais pas d’un personnage du style, il est vieux donc c’est un brave type. Il peut être très rosse aussi.

Pour vous, le meilleur reste à venir ?
Je ne fais pas partie des utopistes. L’utopie ne mène qu’à la déception, en fin de vie. Je suis un optimiste incurable. Le DVD s’appelle : « Un jour, je serais optimiste », une manière de dire que d’emblée, je le suis. Même si notre présent immédiat n’est pas des plus réjouissants. L’humanité ne peut pas faire autrement que de s’en sortir.

C’est le mois de décembre. Que Thierry ou François Pirette peut-il souhaiter aux lecteurs de ce site www.psy.be ?
Je nous souhaite de vivre dans un pays un peu moins bête. Qu’il se ressaisisse pour retrouver un peu de dignité !