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Conseils de psy

Le couple : une histoire à part entière?

/ Par iepra s.p.r.l. Institut Européen de formations Professionnelles en Relation d'Aide / Vivre à 2

Le couple : une histoire à part entière?

Le couple : une histoire à part entière ?

Ou plus simplement l’intégration de deux systèmes de pensée en une bulle commune entourée de deux espaces aussi mystérieux que l’origine de la vie elle-même ? Au-delà de l’humour ou de la provocation, il s’agit d’un des moteurs les plus puissants sur terre. Rappelons-nous certains mythes ou légendes tels que la guerre de Troie, l’Odyssée, la reine de Sabah … ou plus proche de nous Lady Di, Jacqueline Kennedy, Marylin Monroe…

Quel serait donc le point commun à toutes nos expériences de vie ? Qu’elles soient considérées comme positives ou négatives ? Quel serait notre ou nos besoins les plus importants dès que nous parlons de lien, d’émotions, de sentiments, de sécurité et d’épanouissement affectif ?

Et surtout comment repérer, nommer, gérer et digérer « nos émotions » ou, dans leur version plus construite et réfléchie, « nos sentiments ». Nous a-t-on appris à les reconnaître ou avons-nous du nous débrouiller seuls, en imitant, parodiant, prenant le contrepied de ce que nous avions vécu ou compris ou de ce que nous ne souhaitions certainement pas reproduire? Et en gardant en tête que ceci vaut tout autant pour nous-même que pour la personne avec qui nous sommes en lien…

Et , finalement, où y aurait-il un meilleur laboratoire de recherche et de travail sur soi que dans nos relations ?

Que nous parlions des relations familiales, amicales, professionnelles, ou tout simplement sociales et, bien entendu, au cœur de tout ce micmac bien humain… celles de couple ?

Je vous ou nous propose de faire un petit voyage tout à la fois informel et tout-à-fait pratique dans cet univers du Couple.

Empruntons ensemble quelques pistes, plus ou moins balisées, qui pourraient nous aider à comprendre le travail que nous pourrions faire, en tant que thérapeute ou simple usager, pour accompagner le couple et au-delà les individus eux-mêmes, à grandir et à s’épanouir.

 

Tout d’abord, replaçons quelques éléments théoriques :

1.La thérapie de couple ? Quel en serait l’intérêt ?

Son objectif premier est de développer la capacité de résilience du couple afin que les partenaires ne se focalisent plus sur les faiblesses mais retrouvent la capacité à construire sur leurs talents et leurs forces. Et au-delà de cela qu’ils reprennent la responsabilité de leurs parts activées et puissent s’en occuper sans en reporter la charge sur le partenaire. De l’autre côté, que le partenaire puisse aussi développer une meilleure compréhension du système de son partenaire, sans laisser ses propres parts prendre le leadership de leur système, et développer leur empathie naturelle et leur faculté de compassion spontanée.

Dans ce cadre-là, le thérapeute joue un rôle de guide ou de pisteur: il est celui qui a la capacité – de par son expérience et ses outils - de mener le couple à ce que ce dernier souhaite devenir. C’est comme montrer aux partenaires l’image de ce qu’ils veulent créer et les aider à franchir les étapes utiles afin d’y arriver.

Un travail thérapeutique efficace a, au moins, cinq aspects :

  • Un début percutant avec un diagnostic clair
  • La fixation efficace d’objectifs
  • Un changement dans les cycles négatifs/défensifs
  • La résolution des problèmes intrapsychiques pertinents
  • Une facilitation pour le couple à apprendre de nouvelles compétences

A ses débuts (dans les années 80), la thérapie de couple n’était pas considérée comme une vraie thérapie mais plutôt comme une sorte de sous-produit de la thérapie individuelle. Aujourd’hui, elle a obtenu une certaine reconnaissance. Elle permet d’obtenir un changement intrapsychique souvent plus rapidement qu’une thérapie individuelle. Ce qui la rend si dynamique c’est que les différents acteurs peuvent voir le changement s’opérer sous leurs yeux.

Une relation de couple évolue à travers des étapes normales et prédictibles. Les symptômes surviennent quand les partenaires sont incapables de progresser à travers ces étapes. Ces dernières peuvent être mises en parallèle avec certaines étapes du développement de la petite enfance. En reconnaissant ces étapes (et les endroits où ça coince), le thérapeute peut cibler ses interventions là où elles auront le plus d’impact pour apporter un changement.

 

2.Les modèles explicatifs

a.Les étapes du développement (Mahler)

  • 1° Etape autistique (6 premières semaines)
  • 2° Etape de symbiose (de 6 semaines à 6 mois) : l’enfant développe un attachement fort avec la personne qui prend soin de lui. Pour cela, cette personne doit reconnaître et répondre aux besoins de l’enfant afin d’être perçue comme fiable.
  • 3° Etape de différenciation (à partir de 6 mois) : l’enfant expérimente les limites de son corps par rapport à celui de son parent, « où je m’arrête et où tu commences ». Ceci lui permet de sortir de la fusion.
  • 4° Etape de mise en pratique (dès la marche) : l’enfant se tourne entièrement vers la découverte du monde et s’éloigne du parent.
  • 5° Etape de rapprochement (à partir de 18 mois) : l’enfant opère des mouvements d’aller-retour vers son parent. A la fois, il demande son indépendance et reconnaît qu’il a besoin du parent pour être cajolé, réconforté,…
  • 6° Constance libidinale de l’objet (dès la fin de la 3ème année) : l’enfant développe sa capacité à la naissance psychologique. Pour Fred Pine, c’est le processus par lequel l’enfant a un attachement initial. Il développe la capacité cognitive à reconnaître le parent et ensuite, il devient capable d’évoquer son image dans son esprit et finalement d’utiliser cette image pour se réconforter ou pour maintenir l’attachement. L’enfant est alors capable d’atteindre une zone de confort par lui-même (et plus uniquement par sa mère ou son père).

            La capacité à être dépendant ou indépendant est essentielle dans une relation de couple :

Une personne peut-elle s’accrocher à l’image de son partenaire même quand celui-ci n’est pas présent ?

Peut-elle créer une image cohérente qui intègre les bons et les mauvais côtés du partenaire ? Qui puisse prendre en compte les parts du partenaire sans l’identifier à celles-ci mais à qui il est réellement en-dehors de tout activation (Modèle de Richard Schwarz – Internal family System)

Perçoit-elle son partenaire comme digne de confiance ?

Peut-elle tolérer les nuances plus sombres ?
 

b.La théorie de l’attachement (Bowlby & Ainsworth)[1]

Bowlby a observé mère et enfant dans des conditions expérimentales et a étudié ce qui se passait lorsque la mère quittait le laboratoire et durant les minutes suivant son retour. Il voulait décrire les comportements d’attachement activés par la peur, la douleur, la fatigue ou le sentiment que la mère ne serait plus disponible. Il décrivit différents types d’attachement :

  • 1° L’attachement sécurisé : l’enfant veut le contact, le cherche et y trouve l’apaisement. Au retour du parent, un enfant sécurisé va vers lui, est réconforté et retourne à son exploration de l’environnement.
  • 2° L’attachement anxieux – insécurisé : l’enfant n’est pas certain que le parent sera disponible. Lorsque le parent quitte la pièce, l’enfant pleure (tout comme l’enfant sécurisé) mais lorsqu’il revient, l’enfant s’accroche à lui. Une fois le contact rétabli, il reste à proximité, voire accroché à ses jambes, et ne retourne pas rapidement à ses jeux.
  • 3° L’attachement anxieux – évitant ou détaché : ces enfants ont appris très tôt qu’il n’est pas très sûr de dépendre de son parent. Ce sont des enfants qui ont vécu des périodes significatives de séparation durant les six premiers mois (hospitalisation, par exemple). Ces enfants ne s’attendent pas à être réconfortés. Donc, quand le parent revient, ils l’ignorent et continuent à faire ce qu’ils faisaient. Parfois même, ces enfants ne pleurent pas quand le parent quitte la pièce.
  • 4° L’attachement désorganisé : ce quatrième type s’applique aux enfants qui vivent dans des conditions très chaotiques, où rien n’est fiable. En grandissant, ce sont des adultes qui vont détruire la relation et l’arrêter à la moindre contrariété ; Un peu comme un enfant qui casserait ses jouets pour se venger du fait que ses parents lui ont refusé d’en acheter un nouveau.

Bowlby ajoute que l’enfant peut développer différents types d’attachement envers sa mère et son père. Dans un couple, on voit que certaines personnes utilisent un certain type d’attachement jusqu’à ce que les choses deviennent stressantes et activent alors un autre type d’attachement.

Par exemple, quelqu’un de sécurisé peut devenir évitant quand les choses deviennent stressantes. Il se retire, ne s’engage pas, ne cherche pas à réparer.

On appelle cela l’attachement insécurisé mixte. Parfois, une personne va développer l’évitement avec un certain profil d’individus et un autre tel que l’anxieux avec un autre profil d’individu. Au plus, la situation aura été cahotique et complexe avec négligences, maltraitances, etc. au plus nous aurons tendance à observer ce type de mixité au sein des relations adultes.

 

c.Le modèle développemental (Couples Institute)

  • 1° La création du lien : lorsqu’ils se mettent ensemble dans les deux premières années, les partenaires mettent l’emphase sur la création de lien, la connexion et la formation d’un attachement sécurisé. Cette phase de « psychose temporaire » est normale et saine. Elle permet de se préparer à ce qui suit.
  • 2° Le processus de différenciation : ensuite, les partenaires entrent dans le sain processus de différenciation où chacun se définit lui-même, exprime ses besoins, ses pensées et ses sentiments à l’autre. Ils tolèrent également que l’autre se définisse comme un être distinct, qui a ses propres pensées, sentiments, désirs. La différenciation prend place dans un contexte interpersonnel d’une relation proche.
  • 3° L’individualisation : c’est le stade de la mise en pratique. Là, les partenaires s’en vont à la découverte du monde, se centrent sur leur travail, leurs hobbies et moins sur la relation. Durant cette étape, l’estime de soi se développe en dehors de la relation. Ensuite, les partenaires retournent l’un vers l’autre, voient en l’autre une source de réconfort, un soutien. Ils envisagent de créer quelque chose ensemble.
  • 4° La synergie : en progressant par ces différentes étapes, les partenaires atteignent un stade synergique, mutuellement interdépendant.

 

Bien entendu, les couples synergiques se présentent rarement en thérapie… On y rencontre souvent trois types de couples, tous les trois restés coincés à la première étape, essayant de maintenir la symbiose des débuts. Ils sont victimes d’une différenciation ratée chronique.

  • 1° Le couple dépendant-hostile : les partenaires sont fâchés l’un sur l’autre et l’élan premier de leurs disputes est : « tu ne réponds pas suffisamment à MES besoins ». Soit ils sont tous les deux en colère, soit l’un des deux peut être du type passif-agressif.
  • 2° Le couple évitant les conflits : les partenaires pratiquent l’évitement. Ils ne se risquent pas à se différencier et à se définir l’un à l’autre. Ils peuvent en être malheureux mais tout est intériorisé (ou psychosomatisé).
  • 3° Les évitants amicaux : ce sont les couples que tous considèrent comme solides, des piliers de la communauté. Tout le monde est très surpris lorsqu’ils divorcent.

Nous examinerons plus loin le jeu qui se fait entre attachement et différenciation. Et comment, en tant que thérapeute, vous pouvez à la fois aider les partenaires à maintenir ou construire l’attachement, tout en tolérant le processus de différenciation, pour permettre à chaque partenaire d’être lui-même et de développer ses capacités tout en soutenant la différenciation de l’autre.

Nous devons apprendre :

- Comment exploiter l’énergie de développement de chaque partenaire afin de ne pas s’embourber là où le couple s’est lui-même embourbé.

- Comment soutenir la progression plutôt que la régression pour offrir au couple des possibilités d’aller plus loin dans son développement.

- Comment diagnostiquer l’étape de développement atteinte et accorder les interventions à cette étape.

- Comment aider les partenaires à sortir de la provocation et du trauma pour réparer les ruptures et tolérer la différenciation.

- Comment identifier les conflits internes qui interfèrent dans le développement du couple et aider les partenaires à se réapproprier ces projections négatives.

- Comment développer des talents spécifiques.
 

d.Le modèle Ego States Therapy

Nous nous intéresserons plus particulièrement au modèle IFS (Internal family System qui est evidence based aux USA) qui a pris le choix de repérer qu’un couple fonctionnera de la même manière qu’au sein d’une personne.  Qu’est-ce que ce système ?

Il nous faut comprendre qu’un individu en conséquence de ses expériences de vie – quel qu’il soit et quelle que soit son histoire - va développer des facettes de lui que nous nommons « parts ou parties ». Ces parts représentent des programmes qui chercheront à protéger l’individu de son environnement. Elles naissent et se dissocient du Self. Ce Self, ou état de base, a des qualités et est notamment spontanément et naturellement calme, serein et compassionnel. Les qualités à partir desquelles  nous pouvons repérer et nous reconnecter avec cet espace sont celles de courage, de compassion, de confiance en soi, de curiosité, de calme, de clarté, de connectivité et de créativité (les 8 C).

Ces facettes, qui prennent le leadership de notre système, représentent des sous-personnalités appelées en IFS « parts » ou « parties ».

Cette approche tente de repérer et de connaître chacune d'elles. En les nommant nous nous en désidentifions et acquérons la capacité de les traiter.

Nous chercherons à comprendre comment elles fonctionnent en tant que système (curiosité) et comment ce système interagit avec d'autres personnes, et leurs parts, et d'autres systèmes (connectivité et clarté).

Une composante essentielle de cette approche est ce concept de Self, qui est à l'intérieur de chacun de nous et ne peut jamais être endommagé. Le Self est différent des parties d’une personne prises individuellement, et est plus analogue en pratique à « l'âme » d'une personne.

L'objectif de la thérapie, selon cette approche, est de permettre à un individu de construire la force de son Self – ou de s’y reconnecter - et d'obtenir le self leadership de son système animé antérieurement par ses parties.

Richard Schwartz identifie trois types différents de parts qui sont au sein de chaque personne: les pièces exilées qui sont créées à partir d'expériences traumatiques et sont des pièces que nous avons peur de regarder et d'exposer. Les managers sont des parties qui protègent le Soi des parties exilées et les gardent cachées. Les pompiers, quant à eux, émettent de fortes émotions lorsque les parties exilées se déclenchent et les aident à rester dans leur contenu. Nous y trouverons des comportements de deuxième niveau de dissociation tels que les tocs, les phobies, les addictions, les ruminations mentales, les comportements excessifs (workohlisme, sexholisme, sportholisme). Il existe plus de 25 techniques différentes identifiées comme faisant partie de l'approche interne des systèmes familiaux. Cependant, le modèle peut également être utilisé comme un paquet conceptuel en tant que tel et superposé aux techniques d'autres approches. Par exemple, Internal Family Systems a été utilisé avec succès dans la thérapie de jeu avec les enfants, en groupe, psychodrame, thérapie artistique et l’EMDR ou en psychologie énergétique (EFT, REMAP, TFT).

Le but ultime de cette approche, voire modèle, est de ramener la personne à identifier et gérer ses parts, et les retraiter, afin qu’elles se reconnectent - après avoir posé leur fardeau - au Self et cet espace naturellement calme et serein qu’il partage avec toutes les parts du système.

Cet espace est en réalité qui nous sommes en réalité avant d’essuyer les orages de la vie.

Et en pratique cela nous sert à quoi toute cette connaissance ?

Hé bien, bien trop souvent un couple va se parler à partir de ces parts activées, à partir de leurs parties blessées et de leurs mécanismes de défense mis en place pour se protéger de la souffrance occasionnée par cette blessure non digérée.

C’est ce qui va amener le partenaire par l’activation du réflexe de survie, intitulé Fight Flight Freeze, à réagir en mode agressif, en mode fuite ou mode « je me tétanise et je perds mes moyens et ne sais plus ni quoi dire ni faire» car, dans la réalité psychique que je vis à cet instant, je ne peux plus ni échapper à la situation, ni attaquer pour me défendre…

« Bon voyage au sein de l’univers du couple … voyage au-delà des frontières de l’espace et du temps et de ce qu’l’humain a déjà pu découvrir » ( parodie de Star Trek)

Yves Wauthier Freymann
Formateur, superviseur et psychothérapeute certifié,
co-fondateur de iepra , Institut Européen de formations Professionnelles en Relation d’Aide, www.iepra.com
co-auteur de EFT clinique , dangles 2015, et EFT Tapping et psychologie énergétique, Dangles 2010
www. yves-wauthier.com

[1] « A secure base » - J. Bowlby

 

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