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Conseils de psy

Beau-père, belle-mère, un rôle pas toujours facile...

/ Par Dimitri Haikin / Vivre ensemble

Beau-père, belle-mère, un rôle pas toujours facile...

Même si les choses se passent forcément différemment d'une famille à l'autre, lorsqu'un homme ou une femme refait sa vie avec quelqu'un d'autre après une séparation, l'enfant aura besoin de temps pour s'adapter à son nouvel environnement.

La situation du côté de l'enfant.

D'abord, le temps des deuils... 
 

- Deuil du couple de ses parents biologiques
Au début d'une séparation parentale, l'enfant est bouleversé dans ses repères habituels. Il doit avaler la pilule de la séparation.
Il va devoir accepter de ne plus avoir ses deux parents réunis sous le même toit. C'est difficile à vivre. L'enfant va devoir traverser le tunnel de la tristesse pour faire face à cette perte.
Je me souviens du cas d'une petite fille qui avait très mal réagi à l'idée que sa mère et son beau-père ait un enfant ensemble.
Elle était pleine de rage. Ce qui l'insupportait n'était pas qu'ils aient un enfant ensemble mais bien que ce bébé-là allait vivre avec ses deux parents sous le même toit et pas elle.
Une fois cette réalité verbalisée et entendue, elle a pu accueillir son petit frère avec bienveillance.
De plus, dans ces situations, de nombreux enfants gardent très longtemps en eux le fantasme de voir leurs parents réunis un jour, à nouveau, dans une vie commune.
Oui, ce processus de deuil demande du temps et la tolérance des adultes.

- Deuil du lieu de vie
Changer de maison définitivement ou une semaine sur deux est un aussi un fameux changement dans les habitudes de l'enfant.
Il n'est pas facile de vivre dans 2 maisons où les règles sont différentes. Chaque fois, il faut se réadapter.
Nouvel environnement, déplacements nombreux, changements... Peu d'entre nous apprécient le changement... en dehors des bébés mouillés !

- Deuil de certains liens sociaux
Il arrive que l'enfant soit amené à déménager et perde ainsi le contact avec des amis voire avec l'école.
Il convient bien évidemment d'être attentif à provoquer le moins possible de changements pour l'enfant.
Il est en effet injuste que l'enfant "trinque" au niveau social alors qu'il n'a rien demandé à personne.

Les conflits psychiques de l'enfant
Bien souvent dans ce type de situation, l'enfant est enfermé dans des conflits psychiques inconscients (ou plus rarement conscients) dont il n'ose pas parler à ses parents.
Peur de mal faire, peur de faire souffrir ses parents, peurs inavouables…

De manière non exhaustive, voici classiquement le type de conflits psychiques ou de questions obsédantes auxquels un enfant peut être confronté ;

- Conflits de loyauté : en acceptant de rentrer en relation avec un autre homme que mon père et pire encore en m'y attachant, ne vais-je pas générer de la souffrance chez celui-ci ? Autrement dit, mon père ne risque-t-il pas de m'en vouloir ou de me rejeter si je donne une place dans mon cœur à cet autre homme ?
Souvent l'enfant a peur qu'en s'attachant à sa belle-mère ou beau-père, du coup l'autre parent se sente abandonné. Or les enfants ont le droit de bien s'entendre et d'aimer leur beau-père ou belle-mère. Ce n'est pas une obligation, non plus !
L'enfant l'aimera s’il le souhaite vraiment. Il est important de verbaliser ce genre de message. Idem par rapport aux enfants du beau-parent. Après tout, l'amour est un sentiment qui se construit et qui ne s'impose pas.

- Conflits d'identification : généralement, un garçon s'identifie à son père pour grandir et tout d'un coup voilà qu'un autre modèle identificatoire se présente à lui, le nouveau compagnon de sa mère.
L'enfant capte très vite les différences fondamentales entre les deux hommes et cela peut réellement remettre en questions ses certitudes et créer un profond sentiment d'insécurité. Il ne sait plus très bien qui il est vraiment, à qui il a envie de ressembler, à quel modèle il doit s'identifier. Il en va de même bien-sûr pour la fille.

- Conflits liés à l'ambivalence des émotions et des sentiments : l'enfant est souvent prisonnier de ses sentiments contradictoires vis-à-vis de la nouvelle situation et des personnes qui recomposent sa famille.
Amour et haine, joie et tristesse, envie de connaître l'autre et peur, désir et culpabilité... Or, il n'y a rien de plus humain que ces contradictions et je crois qu'il faut pouvoir les entendre et les accepter !

- Conflits liés à la nouvelle fratrie : se retrouver face à une fille du même âge que soi, même si elle deviendra probablement une partenaire de jeu rêvée, n'a rien d'évident dans un premier temps. L'enfant se retrouve face à un miroir dont l'image renvoyée est différente de la sienne ! Il va être confronté aux différences de personnalité avec l'autre enfant et souvent se sentir inférieur sur différents aspects même s'il n'en est rien dans la réalité. Il va craindre également que cet enfant lui prenne une partie de l'amour de sa mère (ou de son père), qu'elle (il) l'estime davantage et donc il peut y voir par moments un véritable rival.
Evitons donc de les comparer l'un à l'autre car comparaison n'est pas raison et est même anxiogène dans ce type de situation.


La situation du côté du beau-père ou de la belle-mère.

Voici quelques conseils adressés aux beaux-parents :

- Acceptez et restez à votre place de beau-père ou de belle-mère
Il est important que le beau-parent ne rentre jamais en compétition ou en rivalité avec le parent de l'enfant. Evitez donc toute forme de jugement ou de dénigrement vis-à-vis de lui. Il doit accepter qu'il n'est et ne sera jamais le père ou la mère de l'enfant. Ce n'est pas nécessairement simple. Souvent il subira d’ailleurs les projections négatives des enfants à son égard. Un peu comme s'il devait endosser la responsabilité de l’échec du couple parental. Heureusement, en règle générale, ce statut de « mauvais objet » disparaîtra au bout de quelques mois.

- Restez garant d’une autorité partagée dans le couple
Le plus difficile est probablement de sentir quand il est nécessaire d’intervenir ou au contraire laisser le parent de l’enfant gérer seul la situation. C’est vraiment une question de feeling et de discussions fréquentes entre adultes afin d’accorder vos violons. Néanmoins, en tant qu'adulte vivant sous le même toit, vous avez aussi une part d'autorité à défendre. Vous êtes aussi garant des règles de vie de la famille. Aussi, ne transigez jamais avec la question du respect ! Ne vous laissez pas malmener sans réagir avec des réflexions du genre : "Tu n'as rien à me dire, tu n'es pas mon père". Répondez : « Ca, je le sais que je ne suis pas ton père et je ne tiens pas à l’être ou le devenir. Cependant, en tant qu’adulte, je suis responsable au même titre que ta mère, du respect des règles de la famille. »
Attention, ne vous positionnez jamais comme le « redresseur de tort », celui qui va « refaire » l’éducation de l’enfant car là vous serez très mal perçu et reçu.

- Ajustez-vous entre adultes
Les valeurs éducatives des uns ne sont pas celles des autres. Pour l'un il sera important de manger à table, pour l'autre, non. Il faudra "mettre en commun" et négocier de nouvelles règles stables. Clarifier les règles et parler, se réunir autour du feu pour faire le point en famille recomposée, dans le respect des uns et des autres, permet de donner à chacun une place à laquelle il a droit.

- Encouragez votre conjoint à passer du temps uniquement en présence de ses enfants.
Offrez également ces moments privilégiés d’intimité à vos enfants si vous en avez. Tout est une question d'équilibre.

- Laissez parler votre cœur
Vous avez aussi le droit de vivre des moments affectifs avec l’enfant de votre conjoint. Construisez cette relation progressivement, en vous ouvrant à l’enfant et en étant attentif à ne jamais vous substituer au parent biologique de l’enfant.


Conclusion
La reconstruction familiale relève parfois de la haute couture. Elle se fait sur mesure et requiert du temps pour s’adapter les uns aux autres. L’écoute, la patience et la tolérance sont les ingrédients indispensables afin de réussir cette nouvelle vie.
Dernier conseil : ne mettez pas tous les problèmes familiaux que vous rencontrerez sur le dos de la recomposition familiale. Toutes les familles, quelles que soient leurs formes, rencontrent des moments difficiles.

Revoir la vidéo de l'émission : "Au quotidien" du 10/09/08 ;