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Conseils de psy

La Place de l'Enfant dans la société

/ Par Christine Henderickx / Vivre ensemble

La Place de l'Enfant dans la société

 

 

Parler d’enfant, c’est déjà inscrire une réflexion dans une époque, une culture. En effet, il y a soixante ans, c’est-à-dire avant l’accès généralisé à la contraception, cette question ne se posait quasiment pas : l’enfant arrivait, s’imposait et il était accueilli avec plus ou moins de bonheur. On s’attendait à l’enfant plus qu’on ne l’attendait.

 

Aujourd’hui, l’enfant se planifie, voire manque dans un pourcentage à la hausse. C’est pourquoi, le désir d’enfant, aujourd’hui, ouvre la réflexion des candidats potentiels à la parentalité. Avoir ou non un enfant est un choix… parfois une attente longue quand l’on s’est positionné pour un « oui » mais que l’enfant tarde à venir. Evoquer le désir d’enfant pourra faire l’objet d’une réflexion ciblée. Mais, d’abord, pour appréhender cette question, faisons un rapide saut dans l’histoire, ici, en Europe, pour comprendre la place qu’a l’enfant dans la société de l’Antiquité à nos jours.
 

Celui qui n’a pas la parole

 

A Rome, durant l’Antiquité, l’enfant était la propriété de son père jusqu’à l’âge de dix ans, le père ayant droit de vie ou de mort sur son propre enfant. Le parricide était vivement condamné, non l’infanticide. La racine du mot enfant indique d’ailleurs la prise en compte de son statut au sein du groupe. « Infans » est celui qui n’a pas la parole : parce qu’il n’y a pas accès d’emblée, parce qu’il ne peut y prétendre pendant plusieurs années. Enfant sans droit mais enfant nécessaire à l’accès à certaines fonctions : pour être sénateur à Rome, il fallait être un homme, d’au moins quarante ans et être père d’au moins un fils. L’enfant, enjeu social du père, témoin de sa puissance.

 

L’apprenti et le maître

 

Au Moyen Age, l’enfant est apprenti, rembourse le coût de ses besoins par le travail et trouve protection auprès du maître qui le rendra rentable.
Que dire de la condition de l’enfant à l’époque industrielle et des accidents dont il était si souvent victime ? L’enfant, bouche à nourrir, surexposé aux dangers.

 

L’enfant, tube digestif

 

Au XIXème siècle, l’enfant, « nourrisson », est envisagé essentiellement comme un tube digestif, obligeant la mère ou la nourrice à l’allaitement. La bourgeoisie nuance quelque peu la place de la femme, attendue tant auprès de l’enfant qu’auprès du mari. L’épouse « tient salon » et ainsi s’émancipe de la fonction nourricière qu’elle délègue à la nourrice. La position de l’enfant reste peu enviable : il est peu élevé par ses parents dont il reste une priorité secondaire.

 

Freud et Pasteur, un tournant dans l’histoire périnatale

 

Ce n’est qu’au XXème siècle avec l’avènement de la psychanalyse et un progrès scientifique que la place de la femme et de l’enfant évoluent. Freud propose un autre destin aux femmes que celui de procréer uniquement ; il suppose également aux enfants d’avoir, dès le plus jeune âge, accès à un imaginaire, des opinions…. Une vraie révolution ! Mais un autre fait marquant ponctue le XXème : la pasteurisation. En stérilisant le verre, en pasteurisant le lait, les femmes ont eu, pour la première fois, le choix d’allaiter ou non grâce aux biberons. Ainsi, on a pu être mère mais pas seulement, garder son enfant auprès de soi tout en reprenant le contrôle de son corps après les relevailles. L’émancipation de la femme a permis un attrait plus engagé des femmes pour la maternité car la maternité n’est plus totale, absolue. En allégeant la charge des femmes, le désir d’accueillir un enfant a commencé à faire son chemin…

 

Politiques natalistes du XXème et XXIème siècle : en protégeant les mères, on protège leurs enfants

 

On observe cette même tendance aujourd’hui dans les pays qui offrent un accès facilité aux lieux de garde d’enfants, autant qu’une déculpabilisation de l’allaitement mixte et de la mise en place d’un accompagnement des mères par des sages femmes conseillères en lactation. Pour qu’un vrai choix s’opère autour de la façon d’élever un enfant. Avec ou sans biberon. Avec un congé d’allaitement.

Les politiques natalistes ne s’y trompent pas : on fait davantage d’enfants lorsque les mesures prises facilitent la vie des femmes et des hommes potentiellement candidats à la parentalité. Réduire la durée d’hospitalisation en maternité ne pourra démontrer ses bénéfices que si un réel accompagnement spécialisé à domicile est mis en place. Prendre en compte les projets de naissance des futures accouchées en est une autre possibilité. Enfin, veiller à respecter l’intégrité des femmes en est un autre moyen, si pas un objectif en soi comme déclinaison d’exigence morale.

 

Et depuis 2019 ?

 

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Depuis, l’enfant devient précieux, voire sacré. On l’attend, on le revendique parfois, on est à son écoute, parfois à son service… à nuancer depuis les politiques mises en place pour contrer le Covid.

A nouveau, nous avons assisté à une politique privilégiant les aînés au détriment des conditions d’épanouissement des enfants : crèches fermées, port du masque obligatoire dès six ans, écoles et lycées à distance… verrou sur les contacts.

En 2020, on a visé la protection du groupe le plus vulnérable face au virus : un groupe âgé de 81 ans en moyenne.

Le sacré est, à nouveau, repassé des enfants aux aînés. Temporairement ou durablement ? L’Histoire nous le dira. Ou alors, nous ferons l’Histoire, en fonction de nos peurs ou plutôt de la gestion de celles-ci, de nos priorités, en cherchant à rassembler et non à éviter, en cessant de polariser les groupes d’âges entre eux.

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Un article proposé et rédigé par Christine-Emmanuelle Henderickx, Psychologue en périnatalité.