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« Les pièges du perfectionnisme », Josh Cohen

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« Les pièges du perfectionnisme », Josh Cohen

En tant que perfectionniste, ce serait un mensonge de dire que cet article ne m’a pas marqué. Pour faire honneur à Josh Cohen, psychanalyste et auteur de l’article, voyons les origines de mon perfectionnisme à travers le prisme de la psychanalyse.

 

Je suis le cadet de ma famille. Celle-ci se compose de :

-  Mon frère : âgé de 3 ans de plus que moi, pour qui j’ai toujours voué une grande admiration ;

-  Ma mère : cadre infirmière et mère dévouée, se coupant toujours en dix pour ses enfants ;

-  Mon père : médecin passionné, reconnu pour la qualité de son travail et son humanité envers ses patients.

D’aussi loin que je me souvienne, mon admiration pour mon frère s’est toujours accompagnée d’un besoin de compétition (non réciproque).
Celui-ci s’est manifesté de bien des manières : mes devoirs qui n’ont jamais nécessité l’intervention de mes parents (contrairement à mon frère) ou bien une compétitivité limite pathologique aux jeux qui, lorsque je venais à perdre, se terminaient souvent par un déferlement de colère.

En ce qui concerne ma mère, parente dévouée et infirmière appliquée, elle correspond tout à fait à la catégorie ‘‘perfectionniste imposée’’ de l’article (qui pousse à vivre selon les attentes d’autrui) : toujours disponible pour nous conduire, mon frère et moi, à nos activités, toujours présente à la sortie de l’école ou pour nous aider dans nos devoirs, tout en jonglant adroitement avec un métier chronophage et épuisant. Quand elle faisait quelque chose, il devait être fait ‘‘comme il faut’’. Inconsciemment, elle a peut-être projeté ce miroir sur ses enfants en espérant nous voir aussi bons voire, idéalement, meilleurs que les autres.

Ce n’est donc pas un hasard si, toute ma vie, j’ai cherché à me distinguer : que ce soit à l’école avec des résultats avoisinants les 100% ou dans mon sport favori en intégrant l’équipe sélectionnant les meilleurs joueurs de la province.
Cependant, quoi que je fasse, il y avait systématiquement quelqu’un de meilleur que moi. Je me rappellerai toujours ma mère me disant : « Tu es bon en tout, mais excellent en rien. »

Par la suite, je me suis mis en quête d’un métier épanouissant conjuguant science et humain.
De par l’influence professionnelle de mes parents, mon désir de distinction et, bien sûr, mon attrait pour les sciences médicales, je me suis naturellement tourné vers la médecine.
C’est ainsi que mon père, jusqu’alors peu présent, est entré en scène.
Il avait pris l’habitude de m’appeler chaque veille d’examen pour savoir comment je me sentais. C’est au détour d’une de ces conversations, avant un examen d’anatomie très compliqué, que je lui avouais ne pas être prêt malgré avoir fait tout ce que je pouvais. C’est alors qu’il me répondit sur un ton sévère : « Qu’est-ce que ça veut dire ‘‘tu as fait tout ce que tu pouvais’’ ? Tu n’aurais pas pu faire mieux ? » Sur le moment, je n’ai pas su quoi répondre. Mais, suite à cette discussion, je me suis imposé une pression croissante, session après session.
Cela aboutira à des tics de grattage allant jusqu’à me faire perdre mes cheveux par touffes, par des palpitations incessantes, par des attaques de panique et par des insomnies complètes me gardant parfois éveillé pendant plus de 48h, nécessitant une médication.

« Le mieux est l’ennemi du bien. »1

Les origines de mon perfectionnisme sont donc probablement liées à :

-  Mon frère aîné que j’ai toujours admiré et avec qui j’ai développé une compétitivité dans un souci d’affirmation et donc de désir identitaire, mais aussi en quête d’amour maternel ;

-  Ma mère pour qui je tentais vainement d’être l’enfant qu’elle idéalisait à travers le filtre du ‘‘comme il faut’’, dans l’espoir d’un jour acquérir son amour inconditionnel ;

-  Mon père, archétype du bon médecin, qui ne se définit que par sa profession, que je voulais rendre fier dans une question d’amour paternel, mais aussi que je cherchais à au moins équivaloir dans un souci d’affirmation et donc, encore, de désir identitaire.

En résumé, mon perfectionnisme prend racine à partir de questions identitaires, mais aussi - et surtout- à partir du simple désir d’être aimé de mes parents. 

Apports de l’article :

Plutôt que de m’apporter quelque chose, l’article vient surtout confirmer plusieurs réflexions que j’ai eu récemment.

En effet, avant de me destiner à la médecine générale, j’avais dans l’idée de faire la médecine interne. Cependant, étant déjà sujet à un stress des plus toxiques pour ma santé, j’ai pensé qu’entamer une carrière internistique - avec la pression hospitalière et la demande de sur-spécialisation, donc de perfectionnisme - causerait ma perte ou, du moins, ne me rendrait pas heureux.

La médecine générale, quant à elle, correspondait plus à mes idéaux : une science au visage plus humain, une pratique extra-hospitalière et des attentes qui ne relèvent pas de l’omniscience.
Cette décision était en réalité mon tout premier renoncement au perfectionnisme.

Comme le conclut Josh Cohen : « Le perfectionnisme semble nous aiguiller vers les réussites de l’âge adulte, mais c’est une attitude foncièrement puérile. Elle nous fait croire que tout s’arrête quand nous y renonçons. Au contraire, c’est à ce moment que la vie peut enfin commencer. »
Courir après un enfant imaginaire et une identité creuse ne m’aurait apporté que frustration, déception, souffrance et malheur.

Avoir renoncé à cela équivalait à donner un second souffle à ma vie. Cet article vient donc me rassurer dans mon choix.

L’article met aussi en évidence le fait que le perfectionnisme est une arme à double tranchant : que ce soit pour Roy et la pression écrasante qu’il s’imposait ou bien pour Lydia et son désir d’être remarquée par sa mère, tous deux se servaient de cette arme pour tenter d’atteindre la perfection. Cependant, on ne peut atteindre l’inaccessible et user de cette arme finira inévitablement par nous blesser, nous laissant meurtris et à jamais insatisfaits.

En conclusion, après mûre réflexion et lecture de cet article, je peux dire que :

  Mon perfectionnisme vient d’une quête identitaire et d’un désir de plaire à mes parents ;

  Ce perfectionnisme a été un puissant moteur dans ma vie, mais aussi source d’une

profonde souffrance ;

  Renoncer au désir de toute-puissance et à l’enfant idéal est la condition sine qua non pour

renouer avec moi-même et ainsi me réapproprier ma vie ;

  Faire le choix de la médecine générale fut le premier pas qui m’a rapproché de moi-même

et éloigné du perfectionnisme et de ses illusions ;

  Être un ‘‘bon père’’ sera sans doute la tâche la plus difficile à laquelle je serai confronté.

1 Voltaire. (1772). La Bégueule.

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