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Conseils de psy

Le syndrôme de la belle-mère ou quand la belle devient la bête

/ Par Egide Altenloh / Vivre ensemble

Le syndrôme de la belle-mère ou quand la belle devient la bête

Marie était heureuse.

Les yeux pétillants, elle envisageait la vie avec son nouvel amoureux. Lui, bel homme, tendre, affectueux et attentionné - il en est donc capable, je note pour plus tard - avait un petit garçon. Sébastien qu’il s’appelait. ce petit brun aux yeux noisettes avait 3 ans et demi. Un ange. Il avait fait d’elle une belle-mère. Youpie.

Et il y avait elle. Elle, la “maman”, était partout et tout le temps. Une sorte d’ombre permanente planant au dessus de la vie heureuse de Marie. L’attentionné faisait de son mieux pour ne pas se la mettre à dos, car elle pouvait être une véritable peste quand elle voulait. Une femme en fait, comme Marie. Marie n’aimait pas les femmes car elles lui rappelaient trop sa mère. Ce n’est pas qu’elle n’ait jamais fantasmé sur l’une ou l’autre de ses copines de lycée. Non, ce n’est pas ça. C’est viscéral.

Et il y avait Eux. L’école, les grands-parents, les amis-parents. Eux, moulés dans un dédain profond à l’égard de la voleuse de papa qu’elle était, ne lui facilitaient pas la vie. Sous des dehors de bienveillance, Eux ne reconnaissaient pas sa place à Marie. Pour venir chercher Sébastien, on lui demandait un mot des parents. Tu n’es pas sa mère, Marie. C’est ainsi.

Et il y avait le temps. Lui, il ne faisait que passer. Mais quel ravage il fit dans le beau ciel bleu de Marie.

Avec le temps, Marie a commencé à se sentir exclue des grandes décisions qui concernaient Sébastien.

Avec le temps, Marie se posait de plus en plus de questions concernant la place dans la famille. Elle se disait que quand elle serait mère à son tour, les choses changeraient.

Avec le temps, Marie est devenue anxieuse à l’idée d’affronter les regards de ces vraies mères attendant de façon convenue leur petit bout devant l’école. Elle se distrayait de ses angoisses en pensant à la tête que les “copines de l’ex” feraient si elle leur demandait quand était la prochaine réunion des parents. Ha ha ha !

Avec le temps, Marie s’est de plus en plus sentie incompétente pour aider Sébastien à grandir, tant il lui était rappelé qu’elle était là pour lui essuyer les fesses au sortir d’un “j’ai fini, c’était un caca”, mais que les autres responsabilités n’étaient pas de son ressort.

Avec le temps, Marie a commencé à se sentir en colère, amère et dégouté au moindre signe de la présence de l’ex, la mère, de plus en plus coupable de ses réactions qu’elle trouve de plus en plus puériles.

Avec le temps, une part sombre de Marie s’est de plus en plus manifestée. La part d’elle qui détestait les femmes. La part d’elle qui déteste la mère. Il arrivait même que cette part s’en prenne à Sébastien, parce qu’il avait pour moitié les gènes de la mère. Elle n’aime pas cette partie d’elle-même et se pose des questions sur sa capacité à être une bonne mère.

Avec le temps, Marie est devenue une marâtre.

 

Cette histoire pourrait être vraie.

C’est la vie de nombreuses belles-mères, qui de belles se transforment en bêtes bien malgré elles, qu’elles aient ou non une bonne relation avec leurs mères.

Pourquoi ? Simplement par amour.

Il faut savoir que L’attentionné, le bel homme de leur coeur, est pris entre trois feux. D’une part, il y a l’ex qu’il a quitté/qui l’a quitté, probablement pour de très bonnes raisons. D’autre part, il y a la mère de son enfant qui mérite certains égards. Ce n’est pas une ex. C’est plus qu’une ex. Et c’est insupportable. L’exclusivité n’est plus de mise. Cette femme a son mot à dire. Puis finalement, il y a la belle qu’il a fait mère par intérim.

Il n’existe pas, dans la mémoire collective, d’image d’une belle-mère reconnue par les autres mères et les instances officielles comme ayant sa place légitime dans la vie d’un enfant. Les belles-mères sont les ennemies des mères car elles sont les plus belles dans les yeux du père de leur enfant. Les mères sont les ennemies des belles-mères car elles sont légitimes. Les belles-mères sont laides, sentent mauvais et sont méchantes. C’est ainsi.

La guerre entre les légitimes et les belles est vieille comme le monde. Cependant, elle n’est pas universelle. Dans certaines cultures, c’est la communauté qui est responsable de l’éducation des enfants, de tous les enfants.

Les mythes ont la vie dure et on attend de la belle le moindre faux pas pour lui prédire une évolution en Lady Trémaine, l’horrible belle-mère de Cendrillon. De toute façon, c’est écrit, une belle-mère reste une belle-mère.

La pression qui est exercée sur les belles-mères est inhumaine et acceptée par tous. Elles n’ont le choix que de se transformer en Cendrillon pour ne pas se voir accuser de marâtre. Soit un esclave ou soit un monstre.

Est-ce juste ? non, bien entendu.

Il existe de nombreux contextes différents ayant leurs spécificités :

  • La belle-mère avec ou sans enfant(s)
  • Les enfants sont très jeunes ou moins jeunes
  • Second, troisième ou quatrième mariage
  • La belle-mère est (était ?) une amie de la mère
  • garde alternée ou non
  • Deuil de la relation fait par la mère ou non avant l’arrivée de la belle-mère
  • ...

Chaque contexte étant différent, il est difficile de donner une recette toute faite pour vous aider mesdames.

Cependant, on peut observer des invariants, comme l’agacement, l’impatience, la colère, le sentiment de rejet et … la mère.

Symbolique ou bien réelle, celle-ci rôde comme un fantôme dans votre vie. Vous ne le supportez plus. Et c’est probablement réciproque.

Partager le coeur de son enfant avec une étrangère qui nous a “piqué” notre homme n’est pas une mince affaire. En plus de nous voler le coeur de notre homme, elle se prépare à prendre une place dans celui de notre enfant. De quoi elle se mêle celle-là ? C’est MON enfant !

Comme vous le présentez, le syndrôme de la belle-mère touche plus qu'une personne. Tout le monde est touché et impliqué dans ces difficultés : la belle-mère, le père, l’enfant, la mère et toutes les autres personnes qui gravitent autour de l’enfant. Personne n’est épargné. Et bien souvent, tout le monde l’ignore. C’est son problème à Marie si elle se sent comme ça.

Et bien non, ce n’est pas que son problème. C’est tout un système qui a précipité Marie dans ce marasme et c’est en agissant sur tout le système que l’on pourra faire en sorte que le contexte dans lequel grandit Sébastien soit le plus épanouissant possible, pour lui comme pour elle(s).

Bien que dans un conte de fées, une discussion familiale “élargie” soit recommandée, avec ou sans l’aide d’un professionnel, ce n’est pas toujours réaliste.

Que peut donc faire Marie pour s’apaiser et tisser une relation épanouissante avec Sébastien et L’attentionné ?

En parler avec son amoureux est déjà la première des choses à faire. Il risque de se sentir sur la sellette. C’est légitime. Il doit faire quelque chose et il a une part de responsabilité dans vos difficultés. Cependant, rassurez-le, il n’est pas le seul responsable. C’est tout un système qui est responsable. C’est toute une culture qui est responsable.

Que peut-il faire ? Vous intégrer dans toutes les décisions éducatives, vous intégrer dans toutes les réflexions concernant l’enfant, ses activités, ses loisirs, ses amis, les anniversaires etc. C’est simple en fait, il doit agir avec vous “comme si” vous étiez une des mères de Sébastien. N’hésitez pas à le lui rappeler de temps en temps, car c’est une posture qui est loin d’être intuitive, surtout s’il lui reste un relent de culpabilité à l’égard de son ex.

Que pouvez-vous faire de votre côté ?

Calmez le jeu. Développez des activités en tête à tête avec le ou les enfants de votre prince charmant. Vous verrez qu’il est possible de construire une relation intime, saine et épanouissante avec ses petits monstres.

Contactez la mère et ayez une conversation franche à propos de l’enfant, de ce que vous voulez pour lui, de ce qu’il représente à vos yeux. Souvent non dites dans la relation mère/belle-mère, les intentions sont souvent mal interprétées. Si vous sentez que le terrain est ouvert aux confidences, aborder la question de ce que vous représentez pour elle et ce qu’elle représente pour vous.

De nombreuses façons de gérer ses émotions existent, comme le sport, la méditation, le yoga, etc. Les émotions ne sont que des messagers et tant que le message n’est pas pleinement passé et que vous avez adopté les actions conséquentes, elles reviendront. Prenez le temps de les écouter, c’est important. N’hésitez pas à faire appel à un professionnel pour vous aider.