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Mes parents sont des manipulateurs

/ Par info psy.be / Etre ado

Mes parents sont des manipulateurs

Mais ne sommes-nous pas tous un peu manipulateurs face à nos enfants ? Est-ce que la manipulation n’est pas automatique dans une relation hiérarchisée ? Non, je n’adhère pas à ce point de vue. Même si on fait parfois appel à l’une ou l’autre menace pour obtenir de nos enfants ce que nous souhaitons, cela ne fait pas de tout parent un manipulateur. Il est possible de vivre son rôle de parent avec franchise et respect, en exerçant une saine autorité, à la fois cadrante et protectrice. Les règles peuvent être clairement édictées, les sanctions annoncées, les idées divergentes acceptées ou négociées, ou au minimum entendues. On peut élever son enfant dans une relation de hiérarchie, sans pour autant le dénigrer, ni le dévaloriser, on peut obtenir ce qui doit être fait par des demandes claires et assumées, même si cela mène au conflit. Le dialogue devrait être maintenu dans le conflit et ce dernier ne devrait pas constituer pour l’enfant une menace de ne plus être aimé, ni admis au sein de la famille. OK, tout cela paraît bien simple quand il ne s’agit que de l’écrire, nous savons tous que le rôle de parent est probablement un des plus durs à mener à bien et pour lequel nous ne sommes pas vraiment formés ! C’est difficile, mais c’est possible.

« Mes parents sont des manipulateurs ! » pensez-vous ? Comment peut-on s’en rendre compte ? Les premières difficultés arrivent souvent à l’adolescence, lorsque l’enfant essaye de trouver son autonomie de pensée, sa trajectoire propre, son style à lui. Il s’oppose, ce qui est somme toute assez normal à cet âge, mais le conflit prend des allures particulières, dont l’enfant ne se rend probablement pas compte : le parent vit cette opposition comme une mise en cause personnelle, qui l’ébranle dans ses fondements fragiles, ce qui lui est insupportable. Au lieu de comprendre ce que l’adolescent vit, de lui servir d’éventuel « punching ball », de cadre solide et sécurisant, ou d’interlocuteur intéressé par cette évolution en essayant de la comprendre, il menace ou s’emporte, use du chantage ou fait le sourd, refuse la discussion, punit outrageusement, n’explique pas sa position sincèrement, frappe, pleure, bref adopte une attitude qui témoigne combien il est intimement ébranlé et combien cette mise en question lui est insupportable, voire impossible.

Intuitivement, l’enfant sent que la menace est lourde et que le risque de perdre l’amour du parent est latent. Il rentre temporairement dans les rangs, jusqu’à la prochaine tentative d’autonomie. Cette scène va se reproduire maintes fois, sous des dehors assez variés, parfois dans la violence, parfois avec une apparente gentillesse et l’enfant va tenter de se construire dans ce déséquilibre, faits de menaces sournoises, d’autoritarisme tordu, de silences culpabilisants, d’explications absentes, de réponses à contre-pied, de sanctions inattendues, d’accusations projectives sous-entendant que c’est à cause de l’enfant que le parent est dans cet état de douleur, alors que c’est justement l’inverse.

L’enfant n’y voit pas clair, se construit dans la culpabilité, développe l’impression de ne jamais être à sa place, se sent maladroit, incompris, décevant, moche, nul, pas à la hauteur, éternellement coupable, profondément blessé, sans cesse en quête de cette reconnaissance qui lui a tant manqué. Il développera un immense doute quant à ses qualités propres, ce qui se manifestera différemment selon son tempérament de base, sa place dans la fratrie et son sexe. Il étouffera toute velléité d’autonomie ou au contraire deviendra rebelle. Il bouillonnera de colère ou refoulera sa haine sous des dehors apparemment attentionnés. Il se sentira terriblement vulnérable ou au contraire hyper-susceptible, ce ne seront jamais que les diverses facettes d’un même problème : la difficulté de se respecter lui-même et de se positionner tranquillement mais fermement face à autrui, sans rugir à la première difficulté ni vendre son âme. La peur du conflit ou la peur de décevoir le musèlent ou en revanche, ce sera la colère qui se rallumera dès qu’il retrouvera ne serait-ce que l’ombre de cette impression étouffante de se faire manipuler. Pour éviter de souffrir, il pourra aussi se protéger à vie derrière des comportements rigides, des règles qu’il s’impose à lui-même autant qu’à ses proches, un mur qu’il bâtit entre lui et les autres. Il arrive aussi qu’il choisisse de tout tourner en dérision, ce qui est une façon efficace de nier la douleur, d’en rire pour ne pas en souffrir, l’image même du clown triste.

Il n’est pas impossible non plus qu’il use lui-même de la manipulation dans ses propres relations et malheureusement avec ses enfants. Peut-être parce que cette manière de fonctionner a constitué son seul modèle et il reproduit inconsciemment ces comportements parce qu’il n’en connaît pas d’autres, peut-être aussi parce qu’il est tellement déstructuré par sa propre enfance, qu’il n’arrive pas à se faire respecter autrement que de façon sournoise et non-assumée. Ce cycle infernal, cette douleur diffuse, ces dégâts qui se reproduisent de génération en génération demandent à l’évidence l’aide d’un thérapeute compétent et expérimenté afin que ces enfants devenus adultes dans ce climat familial toxique puissent enfin se tenir droit, s’assumer et se sentir véritablement libres de vivre la vie qu’ils souhaitent.

Marie Andersen

 

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